Par une belle journée d’hiver….

Un ami me propose d’aller passer la journée à Avignon. Je ne connais pas ses musées et nous nous proposons d’aller les découvrir dans l’après-midi. Le mistral qui souffle rend le ciel clair; cette ville si minérale devient presque italienne au soleil du midi.

Nous choisissons le Petit Palais. Nous montons quelques marches pour atteindre le bâtiment et nous clignons des yeux pour nous habituer à la soudaine obscurité. Quand mes yeux finissent par s’habituer, je distingue d’abord des éclats de lumière qui viennent des tableaux : ce sont les feuilles d’or appliquées par les peintres sur le tableau afin de révéler le caractère sacré et immortel de ce qu’ils représentent. Chaque retable, chaque représentation de la Vierge dégage cette même lumière qui me touche au cœur et que je trouve étonnamment moderne : le contraste entre cet aplat doré et le modelé parfois maladroit du personnage m’enchante. Jamais je n’avais vu réunis autant de tableaux de cette même époque de la pré-renaissance italienne. Certains sont très abîmés mais cette patine et cette imperfection leur donnent une profondeur supplémentaire. Ces tableaux, aussi précieux qu’ils soient, ne sont pas éternels, le bois dévoré en témoigne. Le temps a laissé sa marque, tout comme l’artiste - loin des canons de perfection qui régneront plus tard - a laissé la marque de son humanité. Ces œuvres expriment une ouverture indéniable vers le sacré et nous rappellent en même temps à notre mortalité et à nos limites.

Je cours d’une salle à l’autre, ivre de tant de beauté. Tout d’un coup un nouveau rapport à la peinture s’impose à moi ; je me sens pleine de respect devant ces œuvres d’une densité incroyable.

Quand je sors du musée, dans la pleine lumière, je suis presque étourdie. Quelque chose à l’intérieur de moi s’est profondément modifié. Un chemin vient de s’ouvrir ; j’ai le sentiment que je ne regarderai plus le monde de la même façon.

Suivant
Suivant

Plaidoyer pour le bonheur